Selon moi, la musique est composée de quatre éléments : le cerveau (brain), les tripes (guts), le coeur (heart) et l'âme (soul). Aucun de ces éléments ne peut constituer seul une musique intéressante. Le cerveau seul : la musique de l'IRCAM (Boulez & co), chiant ! Les tripes seules : du punk hardcore sans invention, fatigant pour les oreilles. Le coeur seul : toutes les pires daubes, du genre adagios de musique classique à la flûte de pan. L'âme seule : le chant grégorien, bon... y'en a qui aiment !
En jazz, il existe un génie qui a su équilibrer à la perfection les quatre éléments : John Coltrane. Enlevez le cerveau : vous avez Pharoah Sanders et c'est encore excellent ; enlevez encore l'âme et vous avez Gato Barbieri, j'adore !
L'élément qui rapporte du pognon c'est bien sûr le coeur, un élément à doser avec modération. Prenons un exemple : vous avez Steve Reich dans votre maison de disque, c'est un élément prestigieux, encore un parfait équilibre, avec quand même une prédominance du cerveau ; vous voulez que ça rapporte un peu plus ? Ajoutez un peu de coeur, encore un peu... stop ! Vous avez Philip Glass : plus vendeur, tout en gardant l'indulgence de la critique. Comment vendre encore plus ? Poussez la manette du coeur à fond ! Ce n'est toujours pas l'idéal ? Bien sûr : pour faire un maximum de flouze il faut aussi mettre l'élément cerveau à zéro. Allons-y : le coeur à fond, le cerveau à zéro, qu'obtient-on : Richard Clayderman !
Pour obtenir de la bonne musique, il faut la combinaison parfaite d'au moins deux éléments autre que le coeur, dont on peut aisément se passer. Guts & soul : Albert Ayler ; brain & guts : John Zorn ; brain & soul : Sun Ra...
Reparlons un peu de Gato Barbieri : voilà un artiste qui vers le milieu des années 70 a basculé dans la daube (attention, je n'ai pas dit la dope, ce qui eut été préférable), un peu comme Santana mais avec une nuance de taille, la daube était présente dès le début chez Santana, alors que gato a fait quelques albums sans aucune concession ("Third world" par exemple). Ce basculement s'est fait de façon très simple : diminuons l'élément tripes (le son de saxo trituré à l'extrème) qui fait peur aux auditeurs et augmentons l'élément coeur déjà présent dans les thèmes, jusqu'à ce que ça dégouline ! Pour illustrer cette dérive, voici un morceau d'avant la chûte, intitulé "Bahia", tiré de l'album "Fenix", il y a déjà du savon, ça n'a pas commencé à glisser mais on sent que c'est limite, ce sont les tripes qui tiennent le tout. "Bahia" étant introuvable actuellement, voici "Tupac Amaru", tirée du même album :
Sinon, rien à voir mais c'est l'anniversaire de Thelonious Monk...
RépondreSupprimerBon c'était en 1917, mais, bon...
Bien vu !
RépondreSupprimerTrès amusant et ludique votre truc.
RépondreSupprimerCes 4 directions pourraient vous permettre de situer les artistes sur une sorte de cartographie .
Attention j'ai déposé le brevet : mais je vous le cède contre de bons tuyaux sur les albums en forme de perles définitives -connus ou pas - !
Je trouve cette vision de la musique intéressante. Enfin, si on ne prend pas ça au pied de la lettre évidemment.
RépondreSupprimer( Par contre, pour Santana, je suis assez étonné qu'aucun de leur album ne trouve grâce à tes yeux, même celui avec Alice Coltrane par exemple )
J'adore les trois premiers albums de Santana ainsi que les albums en duo avec Alice Coltrane et avec John McLaughlin. Ce que je voulais dire c'est que dès le début on trouve chez Santana des morceaux calibrés FM qui cotoient des morceaux de plus haute volée.
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